Contexte forêt aluvial du Rhône- CNR

L’engagement d’une entreprise en faveur des territoires : 6 ans d’action de CNR comme catalyseur de l’essor de la marque Végétal local à l’échelle du fleuve Rhône

16/04/2021 - Bassin Rhône Saône Jura - Zone méditerranéenne

La Compagnie nationale du Rhône (CNR) est le 1er producteur français d’électricité d’origine 100 % renouvelable (eau, vent, soleil) et le concessionnaire à but multiple du Rhône (production d’hydroélectricité, navigation, usages agricoles), de la frontière suisse à la mer Méditerranée. Société anonyme d’intérêt général, CNR se distingue par un modèle industriel articulé autour du développement des territoires et par un système unique de partage de la valeur ajoutée avec ses parties prenantes. Sensible à l’intégration de ses projets dans l’environnement rhodanien, CNR s’est engagé dans une démarche éthique d’utilisation de végétaux inféodés au milieu rhodanien, prélevés et/ou produits sur site.

Rabin CNR
William Brasier, CNR
Brasier CNR
Nicolas Rabin, CNR

 

Interview de Nicolas Rabin, Ingénieur Environnement à la Direction Gestion d’Actifs et Concessions de CNR et de William Brasier, Chef de projet Environnement et Milieux Aquatiques de CNR le 5 février 2021.

En tant que maitre d’ouvrage, quels sont vos objectifs en termes d’utilisation de matériel végétal en général ?

Historiquement CNR a favorisé l’utilisation de végétaux provenant de sites proches de ses chantiers, et tout particulièrement lorsque ceux-ci concernaient les projets de restauration de lônes (bras mort du fleuve) du Rhône ou la réactivation des marges alluviales réalisés dès la fin des années 90. L’idée portée par CNR est de favoriser l’utilisation de végétaux sauvages adaptés aux conditions et substrats locaux, garantissant ainsi un meilleur développement des végétaux plantés. Cela permet également une meilleure intégration paysagère tout en évitant un apport potentiel de plantes envahissantes dans le milieu naturel. Aussi depuis près de 20 ans, CNR a acquis des connaissances et développé un savoir-faire en génie écologique et génie végétal afin de répondre à ses exigences pour des espèces ligneuses et des hélophytes en particulier.

Cependant ces méthodes ne présentaient pas un formalisme normalisé pour la traçabilité des plants et pouvant être demandée auprès de nos fournisseurs.

Ainsi lorsque la marque « Végétal local » a été créée en 2015, c’est tout naturellement que nous nous sommes inscrits dans cette démarche et que nous avons souhaité aller plus loin avec la volonté d’impulser auprès des pépiniéristes, des collecteurs et des établissements d’enseignement, à l’échelle de la vallée du Rhône, le développement d’une filière « Végétal local » dans deux régions d’origine (Bassin Rhône-Saône-Jura et Zone Méditerranéenne). En souhaitant que cela se développe et devienne un « standard » pour la végétalisation des projets futurs.

 

Quels éléments ont été décisifs dans votre choix d’un soutien à la marque Végétal local en particulier (Biodiversité, RSE) ?

Nous nous sommes inscrits dans la démarche Végétal local dans la continuité de nos initiatives. Dès le départ la marque s’inscrivait bien dans la politique de développement durable de CNR et s’intégrait dans des projets en termes biodiversité et d’écologie.

Le cahier des charges précis de la marque via son référentiel technique fut en particulier comme une forme de reconnaissance de nos pratiques, car nous étions convaincus par le local mais il n’y avait pas de standards ni de critères officiels sur lesquels nous appuyer. La marque a permis en quelque sorte de légitimer notre expérience sur le végétal d'origine locale, et d’appuyer et de rajouter une brique à notre démarche.

 

Quelles sont vos expériences en tant que gestionnaire sur la production de végétaux indigènes et locaux ? Notamment comment CNR a-t-elle participé au développement de la filière Végétal local (récolteurs et producteurs) ?

Depuis 2015, CNR s’est engagée dans la démarche Végétal local avec une volonté de mettre en place une filière pour répondre à ses besoins. Nous avons donc servi de catalyseurs pour impulser la démarche à plusieurs niveaux :

  • En produisant au départ une liste d’espèces dont CNR avait besoin pour la végétalisation avec l’identification et la cartographie de 72 sites de prélèvements pour 36 espèces réparties sur les 2 régions d’origines ;
  • En recensant sur un rayon de 50km autour du Rhône environ 250 acteurs potentiels, y compris des lycées, pépinières, ESAT… le but était d’évaluer un panel potentiel du marché pour voir si une dynamique en Végétal local pouvait se lancer sur le domaine d’action de CNR qui couvre 2 régions d’origine en termes de plantes arbustives ;
  • En allant collecter du matériel Végétal local nous-mêmes (graines, boutures, ramilles) et en allant démarcher les pépinières afin de leur fournir les graines pour une mise en production et qu’ils se lancent dans la démarche de la marque ;
  • En aidant financièrement les producteurs et les collecteurs la première année ;
  • En produisant nous-mêmes des plants avec la création du parc à boutures de 2,7 ha, avec 20 000 boutures de 9 espèces constitutives de la ripisylves rhodanienne (6 espèces de saules, 2 espèces de peupliers [noir et blanc] et 1 de tamaris), afin de répondre à nos besoins pour la végétalisation de nos chantiers de restauration de milieux naturels sur le Rhône. Ce parc constitue ainsi un vivier des espèces typiques des bords du Rhône contribuant notamment à la sauvegarde d’une espèce emblématique du Rhône comme le peuplier noir (même s'il n'est pas marqué Végétal local).

Au niveau du bilan, les pépinières ont été extrêmement intéressées, et certaines ont adhéré à la marque. En 2020, près de la moitié des collecteurs et producteurs labellisés dans les deux régions d’origines concernées se sont ainsi engagés dans la démarche avec le soutien de CNR. Des plants ont été notamment produits avec une pépinière située dans l’Ain et le soutien a permis de les lancer dans la démarche Végétal local (en 2018 : 60 000 plants sur 11 espèces marquées ont été produits).

Parc à boutures - Soyons
Parc à boutures - Soyons - CNR
Parc à boutures Végétal local - Soyons
Traçabilité des végétaux - parc à boutures Soyons - CNR

En 2021, nous avons ainsi pu mener plusieurs réalisations principalement sur le territoire de notre direction territoriale Rhône-Méditerranée grâce au concours de notre collègue Romain Brusson :

  • Sur la basse Durance à hauteur d’Avignon, restauration de saulaies alluviales avec 2 000 plants Végétal local (5 espèces de la zone Méditerrannée) ;
  • Sur le territoire de la réserve nationale de chasse et faune sauvage de Donzère Mondragon (gestionnaire OFB) : diversification de 1,2 km de talus extérieur d’un contre-canal par la plantation de 1 000 plants d’espèces arbustives majoritairement marquées Végétal local (5 espèces de saule ainsi que du peuplier noir) reconstituant une bande rivulaire ;
  • Dans le cadre d’un projet de labellisation de parcours de « pêche passion » avec la fédération nationale de pêche (FNPF) et la fédération de pêche du Vaucluse (FD AAPPMA 84) sur le site du parc des Liberté (département 30-84) création d’une berge permettant l’accueil de pêcheurs (grand public, enfant, personne à mobilité réduite) avec plantation de 1 500 plants marqués visant à créer une saulaie en reconquête d’espèces exotiques envahissantes (Amorpha fructicosa).

Quels sont les atouts et les challenges que vous avez rencontrés par rapport à la marque ?

Lors des échanges avec les professionnels de la filière, nous avions senti que les cotisations étaient un frein pour que des professionnels se lancent. Nous avons donc décidé dans le cadre de notre projet de les aider financièrement pour la première année afin d’impulser la démarche au niveau de la vallée du Rhône. Par ailleurs, anticiper les besoins et proposer une offre suffisante et durable est essentiel afin que la demande puisse être satisfaite et d’éviter une certaine instabilité entre l’offre et la demande. Dans la conduite de nos projets soumis à des demandes administratives, il est difficile de garantir une quantité définie de plants à une échéance fixe. Ainsi, la formule de contrat de culture est difficilement applicable et apparait relativement peu flexible pour pallier à des modifications du calendrier de mise en œuvre du projet. Il se peut que pour des contraintes particulières, il nous faille annuler ou repousser une commande, tandis que le producteur de son côté doit écouler le stock.

Aussi un des challenges qui ressort de notre retour d’expérience dans la mobilisation d’une filière spécifique comme celle de Végétal local est de réussir à stabiliser cet équilibre entre l’offre et la demande. Aujourd’hui, au travers de nos échanges avec les acteurs de la filière, sécuriser les débouchés apparait comme un levier important pour pérenniser la démarche.   

Quelles perspectives envisagez-vous par rapport à la marque ? Quelles sont vos attentes en tant que gestionnaire vis-à-vis de la marque ?

Une meilleure visibilité sur le matériel végétal de la marque disponible et accessible (par producteur et par région d’origine) serait intéressante à développer. En effet, à l’heure actuelle, sur le site internet de la marque, les bénéficiaires listent l’ensemble des espèces pour lesquelles ils ont déposés une demande mais qui n’est pas systématiquement en adéquation avec la liste des espèces mises en production et donc qui sont disponibles.

D'autre part, il serait intéressant de sensibiliser les professionnels du paysage aux critères de la marque car la restauration de la biodiversité et la gamme Végétal local s'inscrivent dans un changement de paradigme.

Une des perspectives de développement qui pourrait être intéressante à explorer serait la constitution d’un « fonds de renouvellement » ou « fonds de soutien » garantissant une production durable en Végétal local, permettant d’offrir des plants marqués répondant aux besoins des maîtres d’ouvrage. La réflexion pourrait être engagée sur la mise en place d’un système avec les producteurs de plants marqués afin d’assurer un débouché aux éventuels invendus au travers leurs utilisations dans des chantiers de renaturation ou végétalisation via des intermédiaires. 

Enfin, dans le cadre de la constitution du premier parc à boutures Végétal local en France, nous avons pu contribuer au développement de la réflexion de la marque sur ce mode de production de plants. Aujourd’hui nous poursuivons nos recherches avec différents acteurs en vue de développer une méthodologie nous permettant de valoriser l’investissement et les efforts de CNR. Nous recherchons ainsi à accroitre l’efficience du parc en optimisant la durée de production des plants afin de faire correspondre leur disponibilité aux plannings de réalisation de nos chantiers. 

Listes de pépinières bénéficiaires de la marque Végétal local qui ont été soutenues par la CNR :

  • Région Bassin Rhône Saône Jura : CEVE ; Eco-saule’ution ; Pépinière Daniel SOUPE ;
  • Zone Méditerranée : CEVE ; Centre d’Etudes Forestières et Agricoles ; Eco-saule’ution ; Pépinières Daniel SOUPE ; Anne Lachaze.

CNR a également initié des échanges et partenariats avec les pépinières ROUY, NAUDET, VIVIER, LACHAZE et Phytosem

 

 

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